Revue Suisse 4/2019

Revue Suisse / Juillet 2019 / N°4 19 pays. La Suisse doit donc faire preuve d’une grande pru- dence: «Le vote électronique représente un risque inédit en matière de sécurité et de confiance pour notre démo- cratie directe». Pour renforcer la participation politique de la «Cinquième Suisse», Nicolas Rimoldi recommande des solutions comme le vote décentralisé aux ambassades. Ou encore l’envoi électronique des documents de vote, comme le demande son co-initiant, le conseiller national UDC Claudio Zanetti (ZH). L’envoi électronique, une solution bis? Membre du Comité de l’OSE, Claudio Zanetti est farouche- ment opposé au vote électronique, même s’il concède que «l’insuffisance des services postaux dans les pays de rési- dence des Suisses de l’étranger est souvent un obstacle à l’exercice de leur droit de vote». L’envoi électronique per- mettrait aumoins d’éviter l’un des deux trajets postaux. La conseillère nationale libérale-radicale Doris Fiala (ZH), membre du groupe parlementaire des Suisses de l’étranger, est quant à elle fondamentalement favorable à l’e-voting, qui «améliorerait et faciliterait grandement les choses» pour les votants de l’étranger. La population se sert de plus en plus du numérique au quotidien. Ainsi, pour Doris Fiala, il faut «faire entrer la dé- mocratie dans le XXI e siècle», mais elle note qu’avec l’e-vo- ting, les développeurs sont confrontés à des problèmes in- formatiques ultra-complexes: «D’un côté, chaque voix doit être comptée correctement; de l’autre, il faut préserver le secret du vote.» Les failles identifiées dans le système de la Poste sont, dit-elle, «considérables». Elle aussi a conseillé ainsi de différer la révision de la loi. La question outrepasse la technique Être pour ou contre le vote électronique ne dépend pas de l’âge des personnes ou de leur attitude face au numérique. On trouve parmi ses opposants bon nombre de spécialistes de l’informatique. Le placement sur l’échiquier politique ne joue aucun rôle non plus. D’après Adrienne Fichter, jour- naliste technologique aumagazine en ligne «Republik», c’est dû à l’ampleur de la question: «L’exemple de l’e-voting amène pour la première fois la technologie numérique au cœur du débat politique.» Et si certains arguments avancés rappellent ceux qui l’avaient été contre le vote par corres- pondance, les problèmes soulevés par l’e-voting sont bien plus importants: «Un pirate peutmanipuler des dizaines de milliers de voix incognito». Le test d’intrusion de la Poste l’a montré. Adrienne Fichter, éditrice du livre «Smart- phone-Demokratie», salue cependant l’émergence du dé- bat, y voyant le début d’une «réflexion rationnelle» sur les opportunités et les risques de la démocratie numérique. Une réflexion urgente dont devraient s’inspirer d’autres pays aussi. Le vote électronique n’est pas abandonné, mais il est ajourné. À la fin juin, l’OSE s’est déclarée «consternée» par cette récente évolution. Par communiqué de presse, elle a indiqué qu’on prive ainsi de fait les Suisses de l’étranger de leurs droits politiques. Participer aux élections en ligne? Le 20 octobre auront lieu les élections fédérales en Suisse. Les cantons proposeront-ils le vote électronique? À la clôture de la rédaction de la «Revue Suisse», la question restait ouverte. Le Conseil fédéral se pronon- cera en août. Chaque canton a dû introduire une requête séparée. L’autori- sation d’appliquer l’e-voting à l’essai pour les votations n’est pas automa- tiquement valable. Lors des dernières élections fédérales de 2015, quatre cantons ont proposé le vote en ligne. (SWE) Les failles décou- vertes dans le système de vote électronique de la Poste constituent un âpre revers pour le canal de vote numérique. Photo Keystone

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