Revue Suisse 4/2022

qu’une partie des fermiers bio combatte l’initiative? Membre de l’organisation Uniterre, l’agricultrice jurassienne Christine Gerber a son idée là-dessus. «Les hommes sont pris dans un système de loyauté vis-à-vis de leur pairs et retenus par leur éducation, alors que nous les femmes, nous portons les enfants. Nous avons des responsabilités pour le futur», ditelle. Installée dans les Franches-Montagnes, sa ferme est un îlot néo-paysan. On n’y mange de la viande que deux fois par semaine. Christine Gerber se dit favorable à une baisse de la production de volaille et de porcs. Elle regrette les projets visant à augmenter la production de lait. «Plus de vaches, c’est encore plus de lisier. Or la terre en est déjà surchargée», dit-elle. En situation de sécheresse, la paysanne envisagerait de réduire son cheptel. Elle souligne le temps long donné par l’initiative – soit 25 ans – pour organiser une transition vers une agriculture biologique. «Il y aura plus de fermes de petite taille, c’est positif», espère-telle. Agir avant les pénuries de fourrage Pour Greenpeace, cette transition arrivera tôt au tard, en raison de pénuries de céréales et de fourrage, dans un environnement sous pression. «Il faut aider les agriculteurs dépendants de ce système de production et des grands distributeurs», lance Alexandra Gavilano. Elle estime que l’acceptation de l’initiative permettrait de «créer une base politique pour la création d’un fonds de transformation de l’agriculture». Le Conseil fédéral a proposé un contre-projet direct à ce texte. Il aurait imposé que tous les animaux de rente bénéficient de sorties régulières. Le Conseil national n’en a pas voulu. Pro: elevage-intensif.ch Contra: non-initiative-elevage-intensif.ch L’initiative prévoit que la Confédération protège l'agriculture suisse? Il dit craindre pour son commerce. «Si la production recule, du fait de la baisse du nombre de poules par ferme, nous serons concurrencés par la volaille étrangère qui est élevée dans des conditions nettement moins bonnes qu’en Suisse.» Dans l’Union européenne, les fermes à poules peuvent accueillir jusqu’à 100 000 animaux. L’agriculteur estime qu’il serait problématique de multiplier la construction de petites fermes bio, un modèle qui est pourtant le sien! Les initiants pensent au contraire que celles-ci seraient favorables au bien-être animal. Un système de loyauté entre les paysans En cas d’acceptation de l’initiative, environ 5% des exploitations suisses seraient contraintes de modifier leur mode d’élevage. Greenpeace indique que 237 fermes possèdent plus de 12000 poules, représentant 43% du cheptel suisse. Comment expliquer que «les taxes d’importation du fourrage aient été diminuées depuis la guerre en Ukraine». La militante appelle les Suisses à diminuer leur consommation de viande, de lait et d’œufs. L’idée est que les végétaux devraient d’abord servir à nourrir les humains! L’initiative possède aussi un fort versant éthique. «La dignité de l’animal comprend le droit de ne pas faire l’objet d’un élevage intensif», défendent les partisans ce de texte. Ceux-ci soulignent que seuls 12% des animaux d’élevage ont accès à un pré durant leur vie et que jusqu’à 4% des animaux d’élevage meurent avant d’avoir été emmenés à l’abattoir. Confrontés à ces chiffres, Noël Saucy relativise. «Les fermes à 18 000 poules disposent aussi de jardins d’hiver et de pâturages», avance-t-il. Les exploitations conventionnelles peuvent détenir jusqu’à 18 000 poules par halle. Les défenseurs des animaux dénoncent cette densité et leur impact sur le bien-être animal. Ici: élevage de poules à Daillens (VD). Photo Keystone Un tampon pour le bien-être animal: le code 0-CH-BIO est appliqué sur les œufs des fermes qui remplissent les critères de Bio Suisse. Photo Stéphane Herzog Revue Suisse / Août 2022 / N°4 27

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