DÖLF BARBEN L’Emmentaler, ce fromage à gros trous, est connu dans le monde entier. Quand un objet est troué, on dit – et c’est valable dans plusieurs langues – qu’il est troué comme du fromage suisse. Le succès de ce fromage est donc colossal. Aujourd’hui, une centaine de fromageries ont encore le droit de produire de l’Emmentaler suisse. Leur cahier des charges est strict: les fermes qui leur fournissent le lait ne doivent pas se situer à plus de 20 kilomètres, les vaches ne doivent manger que de l’herbe et du foin, mais pas d’ensilage, seul du lait cru peut être utilisé et le fromage doit être entreposé et affiné pendant au moins 120 jours dans sa région d’origine. Chaque fromagerie porte en outre un numéro, qui est inscrit à la surface de chaque meule, tous les quelques centimètres. Ainsi, on sait toujours d’où provient même un petit morceau de fromage. Derrière le numéro 3206, par exemple, se cache la fromagerie de Hüpfenboden. Entourée de prairies et de forêts Elle est située au-dessus de Langnau, le cœur de l’Emmental, qui, grâce au commerce du fromage, a connu De jolis trous et une foule d’imitateurs: tout un fromage! Il y a deux ou trois siècles, les fromagers emmentalois exportaient leur savoir-faire dans le monde entier. C’est aujourd’hui devenu problématique pour l’Emmental, car l’authentique Emmentaler, un produit traditionnel suisse iconique, est sous pression. Il se produit en effet bien plus de fromage labellisé «Emmentaler» hors de Suisse que dans le pays. Les producteurs de fromage suisses attendent à présent de l’aide… de la part des juges européens. de nombreuses années de vaches grasses depuis le XVIe siècle. Son joli bâtiment est assis entre deux collines comme sur une selle. Il est entouré de prairies et de forêts. Marlies Zaugg et BernhardMeier vivent à Hüpfenboden avec leurs deux enfants et un apprenti. Outre l’Emmentaler, ils produisent d’autres spécialités fromagères. Ce sont des maîtres dans leur domaine. Et pourtant, ils n’ont pas l’air particulièrement sereins quand ils évoquent l’avenir. Certes, ils veulent «préserver d’une manière ou d’une autre» la «grande tradition fromagère» de la Suisse. Mais si leur produit n’est pas mieux protégé, disent-ils, cela ne sera Marlies Zaugg n’est pas sereine lorsqu’elle évoque l’avenir: sans protection accrue, pense-t-elle, l’art fromager suisse pourrait disparaître. Photos Danielle Liniger Revue Suisse / Décembre 2022 / N°6 10 Économie
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