«La neutralité de la Suisse». Publication du DFAE, 2022 revue.link/neutralite «Pour une neutralité active. De la Suisse à l’Europe». Micheline Calmy-Rey. PPR (2021) une guerre économique sans merci, dans laquelle même les États neutres étaient impliqués contre leur gré. La Suisse a dû soumettre presque tout son commerce extérieur au contrôle des deux alliances guerrières. C’est alors qu’est apparu le terme de neutralité économique. Après la guerre, la Suisse est entrée à la Société des Nations (SdN). Elle n’était cependant pas prête à renoncer à sa neutralité militaire. Après d’âpres négociations, elle a obtenu, dans la déclaration de Londres de 1920, la dispense de participer aux sanctions militaires, mais non aux sanctions économiques. Ce modèle de neutralité a pris le nom de «neutralité différentielle». Lorsque, dans les années 1930, il s’est avéré que la SdN n’était pas en mesure de garantir la paix mondiale, la Suisse s’en est distancée en proclamant son «retour à la neutralité intégrale» en 1938. La SdN lui a alors accordé le droit de ne plus appliquer les sanctions économiques décidées par la SdN. La Suisse a continué d’appliquer cette «neutralité intégrale» pendant la Deuxième Guerre mondiale et la guerre froide tout en assouplissant peu à peu, depuis les années 1960, cette position rigide et juridiquement très formelle. Le pays est ainsi entré au Conseil de l’Europe, il a mené une politique idéaliste en matière de droits humains et a participé activement aux négociations de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE, aujourd’hui : OSCE). Depuis l’adhésion de la Suisse à l’ONU, il y a 20 ans, la Suisse applique à nouveau une sorte de «neutralité différentielle». Contrairement à 1920, elle ne s’est pas vu accorder formellement de statut neutre au moment de son entrée à l’ONU. Mais elle a déclaré de manière unilatérale vouloir conserver sa neutralité. À présent, la Charte de l’ONU restreint la neutralité et contraint la Suisse à reprendre à son compte les sanctions prononcées par l’ONU. En plus de cela, la loi suisse sur les sanctions prévoit également que le pays suive des sanctions prises par l’OSCE et ses principaux partenaires commerciaux, comme il le fait actuellement avec les sanctions prises par l’Europe contre l’agresseur russe. Le concept de «neutralité coopérative» récemment inventé par le président de la Confédération Ignazio Cassis deviendra-t-il un jour réalité? L’avenir le dira. La neutralité dans le «Dictionnaire historique de la Suisse»: revue.link/neutre Marco Jorio, Dr. h. c., est un historien spécialisé en histoire moderne et en histoire suisse. Il a dirigé pendant 30 ans le projet du «Dictionnaire historique de la Suisse» et en a été le rédacteur en chef. Une histoire de la neutralité paraîtra bientôt sous sa plume. de neutralité qu’il a appliquée jusqu’ici. Il considère notamment que la récente reprise des sanctions de l’UE contre la Russie est compatible avec la neutralité. De plus, le gouvernement veut intensifier sa coopération avec l’étranger – tant avec l’UE qu’avec l’OTAN – sur les questions touchant à la sécurité et à la défense. Si la ministre de la défense Viola Amherd (Le Centre) exclut catégoriquement une adhésion à l’OTAN, elle estime que l’armée suisse doit pouvoir participer, par exemple, à des exercices de défense de l’alliance militaire. «Nous ne pouvons pas nous contenter de profiter», a-t-elle souligné dans une interview accordée à un journal. La Suisse, affirme-t-elle, a besoin de partenariats pour pouvoir compter sur un soutien en cas d’urgence. Or, dit-elle, de telles coopérations sont toujours basées sur «un échange». Enfin, contribuer à la stabilité sur le continent est aussi une question de solidarité. Face à une guerre se déroulant au cœur de l’Europe, les certitudes qui prévalaient au sujet d’une paix et d’une prospérité durables vacillent, y compris en Suisse. Dans un monde instable, ce pays neutre doit retrouver sa place. des règles strictes présidant à l’exportation du matériel de guerre suisse. Si l’on n’envisage pas de livrer directement des armes à un belligérant, des parlementaires de droite s’offusquent tout de même que des pays comme l’Allemagne, par exemple, ne puissent pas fournir à l’Ukraine des munitions pour blindés achetées à la Suisse. Une commission du Conseil des États étudie actuellement des exceptions à cette interdiction dite de réexportation. Normalement, celle-ci sert à éviter que des armes suisses ne se retrouvent entre de «mauvaises» mains par des moyens détournés. Aussi une question de solidarité Comme il l’a réaffirmé cet automne, le Conseil fédéral s’en tient à la politique Revue Suisse / Décembre 2022 / N°6 7
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