4 Schwerpunkt INTERVIEW: SUSANNE WENGER La Revue Suisse: Monsieur Straumann, la fin de l’histoire de CS est-elle une rupture ou un tournant pour la Suisse? Tobias Straumann: Il s’agit tout au moins d’un événement. CS était la plus ancienne des grandes banques encore existantes. Mais sa faillite ne représente pas un tournant majeur. De grandes banques ont déjà disparu dans les années 1990. La Suisse en pos- «L’État devra probablement stabiliser aussi cette nouvelle banque» Fleuron de la tradition bancaire suisse, Credit Suisse (CS) a fait naufrage après 167 ans d’existence: l’État a forcé UBS à racheter sa rivale en perdition. Tobias Straumann, historien de l’économie, nous livre sa vision de la Suisse et des banques, nous parle des illusions de la politique et répond à la question suivante: un petit pays comme la Suisse a-t-il vraiment encore besoin d’une grande banque internationale? 1856 1934 1977 La banque des chemins de fer Alfred Escher (photo), politicien libéral et entrepreneur, fonde le Schweizerische Kreditanstalt (SKA) à Zurich. L’ancêtre de Credit Suisse (CS) devient vite la plus grande banque commerciale du pays; elle cofinance l’extension du réseau ferroviaire suisse. Bonnets de ski pour le peuple Pour se donner une image proche du peuple, Crédit Suisse distribue gratuitement 800 000 bonnets gratuits, qu’on verra sur les pistes de ski jusqu’à la fin des années 1990. Devenus un objet culte, ils valent bien plus que les actions de la banque au moment de la chute de CS. Adoption du secret bancaire Le Parlement inscrit dans la loi le secret bancaire pour les clients des banques en Suisse. Bien que controversé en Suisse et à l’étranger, le secret bancaire sera longtemps ardemment défendu. Face à la pression internationale croissante, surtout liée à l’évasion fiscale, la Suisse abandonne progressivement le secret bancaire pour la clientèle étrangère à partir de 2009. sédait cinq il y a un peu plus de 30 ans, il n’en reste qu’une aujourd’hui. La crise financière mondiale de 2008, avec le sauvetage par l’État de la plus grande banque suisse, UBS, puis la disparition du secret bancaire pour la clientèle étrangère ont été des traumas bien plus importants. Sauvetage d’UBS, fusion contrainte de CS: en 15 ans, l’État a dû secourir à deux reprises des grandes banques en difficulté. Or, la Suisse est un pays qui met en avant les valeurs de l’économie de marché libre. N’est-ce pas paradoxal? L’économie de marché est loin d’être parfaite en Suisse. Nous avons de nombreuses entreprises d’État ou pseudo-entreprises d’État et, dans le secteur bancaire, les banques cantonales, qui sont aussi des entreprises d’État. En outre, je pense que l’intervention de l’État dans les affaires des grandes Photo ETH-Bibliothek, Bildarchiv 4 En profondeur
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