Revue Suisse 6/2023

met de mettre des connaissances théoriques en pratique «dans un environnement technique ultracomplexe». Cette performance est aussi une affaire de transmission, la transmission de la force. La principale difficulté consiste à faire passer la puissance du moteur aussi efficacement que possible au sol. Sans système spécial à cet effet, les roues patineraient, provoquant beaucoup de bruit, mais peu de vitesse. La clé du succès: propulser une masse aussi faible que possible en l’associant à une adhérence au sol aussi forte que possible. Pour renforcer cette accroche, «nous avons développé un système inédit», explique Matthias Rohrer. À savoir un dispositif d’aspiration situé sous la voiture, juste au-dessus de la route. «Ce système est comparable à un aspirateur qui se colle au tapis.» L’appareil ne rogne qu’une fraction de la puissance du moteur, mais développe une pression de contact d’environ 180 kg. Cette pression vient s’ajouter au poids du véhicule et de la pilote. La force de friction des pneus est ainsi à peu près multipliée par deux. Le point crucial est que le dispositif d’aspiration déploie ses effets dès le premier mètre. Dans un concours d’accélération, cela fait une différence essentielle. Des ailerons avant et arrière, comme sur les voitures de Formule 1, ne serviraient à rien, car leur effet de pression ne se déploie qu’à partir d’une certaine vitesse. Pour augmenter encore la performance de leur voiture, les étudiants y ont intégré un système de contrôle de la traction. Lorsqu’une roue menace de patiner, la puissance s’ajuste immédiatement pour l’éviter. «Ainsi, nous pouvons pousser le véhicule à ses limites précises», explique Matthias Rohrer. Enfin, les pneus sont chauffés avant le départ, ce qui accroît encore leur adhérence. Ce coup de maître technique a permis de battre très nettement le record actuel d’accélération. «Nous espérons détenir le nôtre un bon moment», glisse Matthias Rohrer. Passer de 0 à 100 km/h en 0,956 seconde est admirable. Les bolides de Formule 1, les véhicules de course électriques et les voitures de sport puissantes nécessitent bien plus de deux secondes pour y parvenir. Pourtant, il existe des véhicules encore plus rapides: les dragsters. Équipés de moteurs de 10 000 chevaux et de roues arrière géantes, ils parviennent à réaliser cette accélération en 0,6 seconde. Pour se rendre compte de la puissance d’une telle accélération, imaginons ceci: que se passerait-il si le boEN HAUT: Montage des pneus tempérés. On aperçoit le dispositif d’aspiration sous la voiture. lide «Mythen» ne devait pas freiner, mais continuait simplement d’accélérer? Par exemple pendant le temps qu’il vous a fallu pour lire ce texte. Réponse: après 150 secondes, la pilote aurait atteint une vitesse de près de 16 000 km/h et, en partant de Genève, elle aurait déjà quitté la Suisse au niveau de St. Margrethen, au bord du lac de Constance. EN BAS: Le record battu est le fruit d’un travail d’équipe. Photos: EPF Zurich, Alessandro Della Bella Revue Suisse / Décembre 2023 / N°6 19

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