pas seulement les seniors. À BâleVille, un tiers des ménages solos sont composés de personnes âgées de 20 à 40 ans. Dans un monde plus mobile, où la vie se déroule en partie en ligne, les jeunes évoluent dans un univers «où les liens sont plus nombreux, mais souvent plus fragiles», estime Lukas Ott. Qui rappelle que «c’est la qualité et la profondeur de la relation qui est primordiale». L’isolement social est un sujet tabou. «Chez les seniors, ce phénomène est connu. Mais dire qu’on se sent seul quand on est jeune, c’est quelque chose qui est moins bien compris», ajoute le directeur. La solitude honteuse des baby-boomers Au téléphone, nous retrouvons Gottfried*. Ce père de deux enfants adultes est séparé de sa femme depuis une dizaine d’années. Issu du monde de la culture, cet homme de soixante ans a dû se réinventer une activité professionnelle après la période du Covid-19, où nombre d’indépendants ont bu la tasse. Il décrit sa solitude sans détours, dans un monde où amis et connaissances ont souvent connu des divorces et où les conditions de vie des baby-boomers se sont compliquées au fil des ans, reléguant parfois à l’aide sociale des personnes dotées d’un haut niveau de formation. «À mon âge, on n’est pas volontiers single», dit-il. Gottfried décrit un monde où ses congénères souhaitent deux choses a priori contraires: ne pas être seul, tout en maintenant son indépendance et également des standards de vie élevés. «Chacun conserve son lieu de solitude. Les gens pensent que la vie va continuer pour tout le temps», juge cet amateur de bonne chère, qui estime par ailleurs que les relations tage parfois un repas avec lui. Engagée socialement, elle habite ici depuis six ans, après avoir passé l’essentiel de sa vie dans une maison du quartier d’Iselin, construite par son grandpère en 1902. Elle est restée en contact avec ses anciens voisins. Un canton qui s’inquiète de l’isolement À Bâle-Ville, le pourcentage des ménages solos est passé de 21% en 1960 à environ 45% en 1990. Il devrait dépasser 50% d’ici 2050. «On peut mesurer l’isolement social, mais il est difficile de quantifier la solitude», commente Lukas Ott, directeur du Département du développement cantonal et urbain de Bâle-Ville. Ce fonctionnaire a été chargé de la mise en œuvre d’un programme résultant d’un postulat déposé en 2023 au parlement bâlois par le député socialiste Pascal Pfister. Ce plan prévoit un financement de 150’000 francs pour des projets qui seront portés – dès 2025 – par des bénévoles ainsi qu’une stratégie pour lutter contre la solitude. «La ville doit générer de nouvelles possibilités d’être ensemble», dit-il, rappelant que ce canton-ville concentre beaucoup de seniors, d’hôpitaux et d’établissements médicauxsociaux. En 2023, le Canton a écrit un courrier à toutes les personnes âgées vivant seules. La missive donnait deux numéros de téléphone: l’un pour obtenir des informations sur les services de soutien aux seniors et l’autre pour joindre «Mon oreille pour toi», une ligne d’écoute pour les personnes esseulées. La solitude ne concerne Un foyer calme, un environnement animé: même la fontaine de Tinguely, sur la place du théâtre de Bâle, bouge et fait du bruit. Photo Keystone Esther Jeanine Zehntner dans son logement bâlois. Elle a toujours vécu seule. Et affirme aujourd’hui sans hésiter: «Je vis bien.» Photo Stéphane Herzog Plus haut, plus grand, plus rapide, plus beau? À la recherche des records suisses qui sortent de l’ordinaire. Aujourd’hui: Bâle, la ville qui détient le record des ménages solos Revue Suisse / Janvier 2025 / N°1 21
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