Revue Suisse 1/2025

Les deux manières d’imposer une votation populaire En Suisse, il y a deux moyens d’imposer une votation à l’échelle du pays: l’initiative populaire ou le référendum. La première permet d’introduire une nouvelle idée dans la Constitution. Pour ce faire, il faut rassembler 100 000 signatures valables de personnes autorisées à voter en 18 mois. Si tel est le cas, une votation populaire a lieu. Le référendum permet quant à lui de corriger ou d’abroger une décision du Parlement. Il débouche lui aussi sur une votation populaire. Pour ce faire, il est nécessaire de rassembler 50 000 signatures en 100 jours. (ERU) devrions pas oublier ce qui fait la force de notre démocratie directe: l’engagement volontaire». L’autorégulation plutôt que des lois Jusqu’ici, les responsables politiques n’ont rien voulu savoir d’une interdiction. La Chancellerie fédérale veut désormais agir. Elle entend renforcer le monitoring et le contrôle, mise sur l’autorégulation et a lancé un dialogue permanent avec toutes les parties concernées. L’objectif est d’élaborer un code de conduite jusqu’au printemps 2025. Le Parlement, quant à lui, débattra de l’introduction de directives plus strictes pour les prestataires commerciaux et d’une interdiction et obligation de transparence pour les comités. Des membres du Parlement de la gauche à la droite de l’échiquier politique proposent par ailleurs de lancer un essai pilote de collecte électronique. On utiliserait pour ce faire l’infrastructure de confiance de l’e-ID, qui sera disponible à des fins de test dès 2025. Numérisée, la collecte de signatures gagnerait substantiellement en sécurité, avancent les partisans du projet. «On pourrait mieux vérifier les informations», relève Amelle Ako, du mouvement citoyen Campax. Les listes ne devraient plus être envoyées par la poste puis soumises à un contrôle fastidieux. Tout le processus serait simplifié. Le Conseil fédéral s’est penché sur les opportunités et les risques de l’e-collecte. Il veut autoriser des essais pratiques limités et a commandé un projet préliminaire à cet effet. Le scandale de la fraude aux signatures joue en faveur des promoteurs d’une solution purement numérique. «La collecte électronique est à même de rétablir la confiance dans l’exercice des droits politiques», affirme Amelle Ako. effrayante», note Daniel Graf, de la Fondation pour la démocratie directe. Certes, des soupçons de manipulation par des entreprises commerciales existent depuis plusieurs années déjà. «Mais je pensais qu’il s’agissait de cas isolés, qui étaient «Lorsqu’on est rémunéré au nombre de signatures, l’incitation à la falsification est importante.» Relever des noms sur des boîtes aux lettres permet de gagner beaucoup d’argent en peu de temps. «C’est un problème, mais on pourrait par exemple le résoudre au moyen d’un salaire horaire.» À présent, souligne-t-elle, ce sont les collecteurs bénévoles qui font les frais des écarts de conduite portés à la connaissance du public. Et qui se heurtent désormais à une défiance croissante dans la rue. «Quand on récoltait entre 20 et 30 signatures auparavant, on en récolte encore 10 à 15 aujourd’hui.» Daniel Graf confirme cette observation. «De nombreux passants se demandent s’ils ont donné leur signature à une citoyenne engagée ou à un collecteur rémunéré, et ce qu’il adviendra de leurs données.» À défaut de moyens d’action légaux pour lutter efficacement contre les abus, il plaide pour une interdiction du commerce de signatures. «Nous ne Daniel Graf, de la Fondation pour la démocratie directe, parle de «tremblement de terre politicodémocratique». Photo Keystone poursuivis pénalement si nécessaire.» Force est de constater, poursuit-il, que les administrations cantonales et la CF n’ont pas réussi à lutter contre les abus de manière précoce et efficace. Aucun résultat n’a été faussé Les entreprises commerciales incriminées sont accusées de fraude électorale, une infraction grave, pouvant être sanctionnée par une amende ou une peine de prison de trois ans. Il faut souligner que dans les cas présents, les résultats n’ont pas été faussés. Il est possible que des initiatives populaires aient illégitimement abouti en votation. Cependant, c’est toujours le peuple qui a eu le dernier mot. «Aucun objet n’a été adopté sans que les Suisses le veuillent», note le politologue Michael Hermann. Aucun bulletin de vote ou électoral n’a été manipulé, et aucun résultat n’a donc été faussé: «Une telle tromperie serait bien plus grave.» Le système en vigueur favorise les abus, déclare Rahel Estermann, secrétaire générale des Vert-e-s suisses. Revue Suisse / Janvier 2025 / N°1 27

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