Revue Suisse 2/2025

STÉPHANE HERZOG Le bureau genevois d’ingénieurs et de designers du bois «Charpente Concept» fait office de Mecque du bois. Fondé en 1991 par le maître charpentier Thomas Büchi, ce cabinet a dessiné la «Broken Chair» de la place des Nations à Genève, construit – en bois – le refuge du Goûter sur les flancs du Mont-Blanc et conçu le Palais de l’Équilibre, immense sphère de bois présentée à l’Exposition nationale en 2002 avant d’être installée au CERN. Autre fierté de ce bureau? Il a été chargé après l’incendie de la cathédrale Notre-Dame d’établir une analyse technique de la nef en vue de sa reconstruction. Le bureau a eu dans les mains des archives vieilles de 600 ans. Un plongeon dans le Moyen Âge, lorsque 20 ans pouvaient s’écouler entre la coupe du bois et l’usage des poutres. Le bois reprend sa place «Le bois reprend la place qu’il avait perdue au fil des siècles avec l’usage de l’acier, puis du béton. On avait oublié les qualités de ce matériau», plaide Rafael Villar, vice-président de l’entreprise. Diplômé en 1996, il se souvient de ses débuts, quand les défenseurs du bois passaient un peu pour des farfelus. Certes, le bureau en question venait de construire une halle d’exposition en bois longue de 300 mètres à Genève, mais l’essentiel des commandes concernait surtout des chalets et quelques toitures de salles de sport. Aujourd’hui, le bois sert à créer des immeubles de logements. «En 30 ans, les délais de livraison de certaines pièces ont plus que doublé», note le Genevois. Signe d’une forte demande. Les ultrasons permettent de définir la résistance des pièces avant leur façonnage. Leur découpe a lieu à l’aide de machines numériques. Sur les chantiers, l’assemblage d’éléments de bois préfabriqués réduit considérablement les délais de construction par rapport à des murs minéraux. «Léger, le bois facilite les projets de surélévation», souligne Sébastien Droz, porte-parole de la faîtière des métiers du bois Lignum. Si bien que le temps des gratteciel en bois est arrivé. À Winterthour, dans le quartier de Lokstadt, la tour Le retour en force du bois dans la construction en Suisse Capable de stocker le CO2, le bois cartonne dans le domaine du bâti. Il sert même à élever des gratte-ciel. Le savoir-faire suisse fait mouche. La demande est en hausse. Non sans révéler des tensions. Rocket mesurera 100 mètres de haut. «Il s’agit de l’un des plus hauts immeubles d’habitation en bois en cours de planification», vante Ina Invest, le maître d’ouvrage. La construction de la tour nécessitera 3300 mètres cubes de bois, employés pour la structure porteuse. «Nous utiliserons du hêtre et de l’épicéa provenant de la Suisse et des pays voisins», précise Stephan Meierhofer, porte-parole. «Le bois est très résisPlus haut, plus grand, plus rapide, plus beau? À la recherche des records suisses qui sortent de l’ordinaire. Aujourd’hui: En route vers les plus hautes constructions en bois du monde À Winterthour, on construit actuellement la plus haute tour résidentielle du monde en bois: elle se nomme Rocket et fusera à 100 mètres de haut. Image Ina Invest 14 Reportage

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